La colère de Zelensky, la menace de boycott
Le Comité national olympique d’Ukraine (NOCU) doit tenir une assemblée générale extraordinaire pour discuter de l’opportunité de boycotter Paris 2024 si les sportifs russes et biélorusses sont autorisés à concourir comme le CIO vient de l’approuver. Depuis la décision du CIO, le président Ukrainien Zelensky ne décolère pas.
L’Assemblée générale extraordinaire du NOCU est prévu le 3 février prochain. Elle intervient quelques jours après la décision du CIO qui souhaite « une voie de retour » pour les sportifs russes et biélorusses afin de leur permettre de concourir à Paris 2024. Pour y parvenir, ils bénéficieront du soutien du Conseil olympique d’Asie qui a proposé aux russes et biélorusses de participer aux Jeux asiatiques d’Hangzhou 2022, reportés à fin septembre de cette année.
Le CIO a toutefois mis quelques conditions au retour des sportifs russes et biélorusses avec l’interdiction des symboles nationaux comme les drapeaux, les couleurs et les hymnes. Il a surtout mis en avant que le retour des sportifs se ferait dans des « conditions strictes » de neutralité. En d’autres termes, seuls ceux qui « respectent pleinement la Charte olympique », c’est a dire qui n’ont pas combattu sur le front ukrainien pourraient participer. Une condition qui apparait difficilement vérifiable.
Mais pour l’ONU, le CIO ne va pas assez loin. Deux fonctionnaires de l’organisation soulignent que le CIO ne devrait pas envisager d’autoriser seulement les athlètes des deux pays n’ayant pas activement soutenu la guerre en Ukraine. « Cette condition ouvre la porte aux pressions et à l’interprétation », expliquent les deux expertes, mandatées par le Conseil des droits de l’homme.
Elles exhortent donc le CIO à « aller plus loin, en garantissant la non-discrimination de tout athlète sur la base de sa nationalité »… qu’ils aient ou non participé à la guerre en Ukraine.
La colère froide de Zelensky
Cette position du CIO fâche profondément le président ukrainien Volodymyr Zelensky qui vient d’inviter le président du Comité international olympique (CIO) Thomas Bach dans la ville déchirée par la guerre de Bakhmut, une ville de la région orientale de Donetsk (photo), pour « voir de ses propres yeux que la neutralité n’existe pas ».
« J’ai parlé avec lui plusieurs fois et je n’ai jamais entendu comment il allait protéger le sport de la propagande de guerre s’il renvoyait les athlètes russes aux compétitions internationales », a déclaré Zelensky lors d’une vidéo de cinq minutes sur Twitter.
« Il n’y a pas de neutralité quand une guerre comme celle-ci se déroule et nous savons à quelle fréquence les tyrannies essaient d’utiliser le sport pour leurs intérêts idéologiques. Il est évident que tout drapeau neutre des athlètes russes est taché de sang ».
« La Russie doit arrêter l’agression et la terreur et ce n’est qu’après cela qu’il sera possible de parler de la participation russe dans le contexte du Mouvement olympique ».
Afin d’obtenir du monde du sport ce qu’il n’a pas obtenu du CIO, le président ukrainien Zelensky a exhorté les fédérations internationales (FI) à empêcher les sportifs russes et biélorusses de participer aux compétitions internationales.
On doute néanmoins que sa démarche aboutisse. Le CIO reste le principal bailleur de fonds de toutes ces fédérations.
La position inflexible du CIO
Face à la menace de boycott du Comité olympique ukrainien, Thomas Bach (photo) avait récemment déclaré qu’un éventuel boycott de Paris 2024 par l’Ukraine en raison de la participation russe n’était « pas conforme à notre mission »… qui est de fédérer l’ensemble des pays autour de la compétition olympique.
« Nous connaissons le point de vue de l’Ukraine, qui non seulement veut isoler la Russie en tant qu’État mais veut également isoler complètement tous les Russes », a déclaré Bach.
Le CIO se retranche derrière une position de principe : « aucun athlète ne devrait être empêché de concourir uniquement à cause de son passeport » et « les gouvernements ne doivent pas décider quels athlètes peuvent participer à quelle compétition et quels athlètes ne le peuvent pas ».
Face à cette position inflexible qui consacre le retour des sportifs russes et biélorusses dans l’univers du sport International, le ministre ukrainien des Sports, Vadym Guttsait brandit aujourd’hui la menace de boycotter les Jeux olympiques, l’année prochaine à Paris. Même s’il a déjà été démontré que l’arme du boycott était rarement efficace, d’autres pays pourraient lui emboiter le pas.
C’est le cas des voisins de l’Ukraine, la Pologne, l’Estonie, la Lituanie et la Lettonie. Mais la contestation gagne du terrain puisque vient de s’y ajouter la Norvège.
La première ministre estonienne Kaja Kallas (photo) a déclaré : « Le sport est un outil de la machine de propagande russe, ignorer cela signifie se ranger du côté de l’agression », a t-il écrit sur Twitter.